"RÉCIT D'UN TEMPS COURT"
25.07.2016 Exposition MAMCO, Musée d'Art Moderne et Contemporain, Genève, jusqu'au 4 septembre 2016
Photo: Vue partielle de l'exposition, http://www.mamco.ch/expositions.html
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John M Armleder, Francis Baudevin, Lisa Beck, Alexandre Bianchini, Stéphane Dafflon, Philippe Decrauzat, Steve DiBenedetto, Marcia Hafif, Helmut Federle, Sylvie Fleury, Christian Floquet, Francesca Gabbiani, Peter Halley, Karen Kilimnik, Alix Lambert, Christian Marclay, Cady Noland, Olivier Mosset, Amy O'Neill, Steven Parrino, Michael Scott, Haim Steinbach, Sidney Stucki, Blair Thurman, John Tremblay, Alan Uglow, Vidya Gastaldon & Jean-Michel Wicker, Dan Walsh
L'exposition revient sur les échanges des scènes artistiques de New York
et de Suisse romande, entre le début des années 1980 et la fin des années
1990. Soit, entre le moment où Olivier Mosset parle de «peinture
radicale» avec Marcia Hafif (pour reprendre le titre de l'exposition du
Williamstown College Museum of Art de 1979) et l'apparent éclatement de ce
vocabulaire abstrait dans les pratiques d'artistes tels que Philippe
Decrauzat, Stéphane Dafflon ou Lisa Beck.
On suit en effet, salle par salle, les étapes d'une discussion
intergénérationnelle qui s'origine dans la peinture, mais outrepasse
rapidement toute définition par médium. Ainsi en est-il des conversations que
John M Armleder aura, dès le milieu des années 1980, avec Peter Halley et
Haim Steinbach, autour de la notion de «géométrie culturelle» (ou
«néo-géo» comme la critique de l'époque la désigne), mais
également avec Helmut Federle et Olivier Mosset sur l'héritage de
l'abstraction dans la période «postmoderne». En ce sens, la
présente exposition se place dans la perspective de l'entreprise conduite par
John M Armleder lorsqu'il organise à Genève Peinture abstraite en
1984, puis Peinture en 1990, à l'initiative de Pierre Huber.
Les collaborations d'Olivier Mosset avec Steven Parrino (et l'évocation de
son exposition avec Cady Noland en 1999 par le choix d'une pièce issue de
cette manifestation), soulignent que l'annonce répétée de la mort du champ pictural
invite au surgissement d'un réel souvent chargé de violence - et fait de la
figure du zombie son véritable héraut.
Pour beaucoup d'artistes des années 1990, la peinture doit alors être
«rechargée» par des contenus extérieurs (musique, design, appropriation,
etc.). C'est le cas de Francis Baudevin, qui reprend des emballages de
médicaments comme autant d'abstractions trouvées, de Blair Thurman dont les
constructions en relief s'inspirent des sous-cultures de l'automobile ou de
John Tremblay qui cherche à donner à ses objets peints la qualité d'éléments
industriels faits main. D'autres, tels que Dan Walsh et Michael Scott,
chercheront dans la phénoménologie (symbolique ou optique) les ressorts d'une
relation renouvelée au regardeur. Au final, c'est sans doute la pression
conjuguée de ces différentes remises en jeu de la peinture qui explique son
éclatement référentiel et sa spatialisation, à l'orée des années 2000.
Au passage, l'exposition rappelle que des artistes femmes développèrent un rapport plus distant à cette histoire encore largement narrée sur le mode masculin et, à l'instar de Sylvie Fleury et Karen Kilimnik, furent réunies dans des manifestations pointant une nouvelle sensibilité féministe (telle que Bad Girls, en 1993).
L'exposition évoque encore, par sa
dimension dialogique et l'origine de ses prêts (presque uniquement issus de
Genève), l'importance de passeurs entre les deux scènes - qu'ils soient
artistes, commissaires d'exposition (à l'instar de Bob Nickas) ou galeristes -
et la coprésence d'acteurs culturels (institutions, écoles, éditeurs, lieux
alternatifs, etc.) qui constituent l'écosystème d'une ville.
Lionel Bovier
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